15 octobre 2019

Réorganisation des Territoires d’Action Sociale : échec sur le fond, échec sur la forme !

Séance plénière du 7 octobre 2019

Intervention de Maël DE CALAN

Président de l’ALLIANCE POUR LE FINISTÈRE

Conseiller départemental du canton de Saint-Pol-de-Léon

 

Madame la Présidente,

Jusqu’en juin dernier vous présentiez la Revue de l’Organisation et des Processus (ROP) comme un processus parfaitement engagé, partagé par les agents et sur lequel il n’y avait aucun problème, en vous contentant de parler des objectifs qui étaient poursuivis et auxquels nous adhérons en partie. Tout va très bien Madame la Marquise, pouvait-on croire en vous écoutant. Jusqu’à ce qu’on se rende compte que tout n’allait pas bien et que les agents étaient vent debout contre cette réforme.

Nous avons lu avec intérêt les 88 pages des « paroles d’agents » que les syndicats nous ont communiquées en amont de ce débat. Nous y avons retrouvé, page après page, l’échec de votre méthode bien plus qu’une contestation du fond.

C’est un secret de polichinelle dans cette maison, le dialogue social est exécrable depuis le début de ce mandat, je dirais même préoccupantes, et la mobilisation du personnel dans le cadre de la ROP en est le témoin. Les agents nous disent qu’il n’y pas d’interlocuteur, pas de cap, pas de personne avec qui passer des accords et avoir une parole solide sur laquelle s’appuyer pour travailler.

 

***

Ce que l’on trouve dans ces pages, ce sont les ingrédients de l’échec de votre méthode :

  • L’absence d’écoute et de concertation véritable: vous parlez d’une centaine de réunions, mais ce que nous entendons c’est que les décisions sont prises alors que la concertation n’était pas achevée, que les engagements pris envers les infirmières puéricultrices ne sont pas tenus (elles ne devaient pas être impactées par la ROP), etc. Or, l’écoute ce n’est pas l’organisation de réunions, c’est la capacité d’entendre les agents et parfois de reconnaître franchement qu’une décision est déjà prise et qu’elle ne sera plus discutée.
  • Une méthode confuse et contradictoire : avec la succession de réformes qui ne sont pas évaluées (ex. sur les IP en 2015, sur la mise en place des Directions Territoriales d’Action Sociale en 2017), on est dans le mouvement permanent sans l’expliquer aux agents, et il en résulte un malaise très profond.
  • Un mauvais management de votre part, que vos vice-présidents reconnaissent hors séance, se traduisant par exemple par des congés maladie ou des non remplacements des chefs de services (ex : Carhaix), le renouvellement au dernier moment des CDD d’agents qui vivent dans une grande précarité dans tous les Territoires d’Action Sociale, alors qu’on doit leur donner des perspectives quel que soient les contraintes économiques, ou des redécoupages qui se font sans donner là non plus de perspectives aux agents (ex : Centre Départemental d’Action Social de Châteaulin).
  • L’absence de transparence sur les objectifs recherchés: dans le débat sur le temps de travail, comme sur celui des départs en retraite, ou aujourd’hui de la ROP, vous refusez d’assumer clairement des objectifs de productivité, vous refusez d’arbitrer entre les missions, aboutissant à tirer jusqu’à la déchirure les organisations et les personnels.

 

Ce que nous contestons, et nous le disons clairement y compris aux agents, ce n’est pas votre légitimité à donner un cap à l’action sociale : c’est bien aux élus de décider, sans quoi les élections ne serviraient à rien. Ce que nous contestons, c’est l’absence d’écoute, c’est une méthode confuse, un défaut de management, et une absence de transparence sur les objectifs.

Pour conclure sur cette partie je dirai que trouver un sens ou une vision dans cette ROP que vous nous proposez, c’est comme le disait Charles Darwin, être comme des « aveugles qui, dans une pièce sombre, cherchent un chat noir qui n’y est pas ».

 

***

Au-delà de votre méthode, les rapports d’aujourd’hui signalent l’échec d’une politique qui se traduit par les dérives des frais de fonctionnement.

La contrainte budgétaire a le dos large, vous la mettez à toutes les sauces : elle consiste à se défausser de toute responsabilité en la mettant sur le dos du gouvernement, depuis 2017. La contrainte budgétaire n’est pas liée aux impôts que nous aurions diminué – ils ont augmenté de 8% il y a 2 ans ! Elle n’est pas liée à la baisse des dotations – elles ont diminué entre 2013 et 2016 mais ont été stabilisées. Cette contrainte, elle est liée à la dérive des frais de fonctionnement. Une partie que l’on subit : augmentation des frais liés au RSA, transferts de compétences non compensés par l’État, mais elle est aussi et surtout liée à l’incapacité de cette majorité à arbitrer entre ses missions, à mettre en place un contrôle de gestion systématique et rigoureux, et par des dépenses que nous contestons d’instances en instances, et permettez-moi d’en lister ici quelques-unes :

  • Musées : les grands et les petits, dont le musée des phares, dont le coût hallucinant dépasse les 17 millions d’euros ! Alors que l’EPCC coûte déjà 4 millions d’euros par an, c’est de l’investissement mais une fois construit il engendrera des frais de fonctionnement importants.
  • Pen Ar Bed numérique dans lequel nous avons englouti 13 millions d’euros pour couvrir 4 000 foyers, et que nous cédons aujourd’hui pour une bouchée de pain. Tout le monde peut se tromper, mais c’est bien aussi de le reconnaitre !
  • « Ouest go », le Blablacar breton dans lequel nous avons englouti 400 000 € ! Les 4 000 agents du Département auraient aimé une augmentation de salaire à la place de cette dépense inutile et qui va continuer via des campagnes de communications tentant de rattraper cet échec.
  • Une pluie de subventions clientélistes : formation des délégués de classe par vos amis de la ligue de l’enseignement, 10 000 € dans un baromètre de la pauvreté qui ne va améliorer en rien la lutte contre la précarité dans le département, 3500 € à l’association Minga qui oscille entre communisme et socialisme, …
  • Le budget de la communication, le budget de votre cabinet, ou vos voitures avec chauffeurs, …
  • Et surtout votre refus mystérieux, incompréhensible et coupable depuis le début du mandat de mettre en place toute forme de contrôle de gestion, d’engager une revue générale des politiques départementales pour dégager des économies que nous pourrions réinvestir dans le cœur de nos prérogatives. Ce Département doit être une des seules institutions à dépenser 1 milliard d’euro par an sans avoir des agents dont le métier est de contrôler les dépenses pour dégager des économies à réinvestir dans des dépenses prioritaires.

 

Cette politique qui consiste à ne rien faire, et à laisser dériver les dépenses, va progressivement étrangler l’investissement départemental tout en enlevant aux agents les moyens de leur travail.

Depuis 4 ans, nous nous alarmons sur le fait que ce Département est géré par des cigales et non par des fourmis. Ce dont témoigne la mobilisation des agents, c’est que les cigales chantent faux, mal, et d’un son qui ne respecte pas les agents.

Tout cela, Madame la Présidente, traduit donc bien un échec sur le fond, et un échec sur la forme !